Retour en Mauritanie
Le Colonel Kadhafi de Libye, escorté par 3500 personnes, arrive à Nouakchott pour la fête musulmane du Mouloud qui commémore la naissance du prophète. La ville est en effervescence. Des distributions de nourriture ont été annoncées autour du stade où devrait se tenir la prière commune. Des autobus sont venus par dizaines de toutes les régions. Sur le pare-brise, un portrait de Kadhafi et un autre du président de la Mauritanie, arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’état récent. Le président est donc en quête de reconnaissance face aux réticences des pays occidentaux à valider sa légitimité institutionnelle.
260 kilomètres au nord de la capitale, je retrouve Arthoun du village de pêcheurs imraghen d’Erkeiss situé dans le parc du Banc d’Arguin. Devant la carte détaillée, nous traçons l’itinéraire utile à parcourir le lendemain en kart à voile. Un néon alimenté par un panneau solaire éclaire la veillée qui se tient dans le salon maure, à demi couché sur les tapis, à l’abri du vent de sable.
330 kilomètres de plages sans escale !
La nature est généreuse ce matin. Le vent souffle dans le bon sens. Un bon vent de travers qui autorise les performances car si le vent est gratuit il n’est pas garanti !
Durant la première heure, ce sont plus de quarante kilomètres avalés à une moyenne de 48,5 km/h et des pointes de vitesse dépassant les 60 km/h.
Le lieu est superbe. Il s’agit d’une plaine au sol durci par l’eau de mer, appelée « sebkha ».
Ensuite la zone utile se limite à une bande de sable dur qui longe la Baie de Saint-Jean jusqu’à Mamghar. Au total, en un jour, ce sont plus de 120 km avalés, assis confortablement au volant du Blokart, la voile bien bordée.
Entre mer et désert, le parc national du Banc d’Arguin
Au poste de Mamghar, au sud du parc du Banc d’Arguin, je retrouve le chef de poste, surveillant du parc. Nous avions passé le Nouvel An ensemble, fin 2005. Après les salutations, j’insiste pour qu’il essaie l’engin « à vent ». Il monte dans le kart à voile et parcourt quelques centaines de mètres. Il semble ravi de découvrir qu’il existe d’autres moyens de transport que les lourds tout-terrains qui sillonnent habituellement les pistes du parc.
Ici, les énergies renouvelables adoptées sont devenues indispensables à l’activité du parc !
La station de Mamghar est équipée d’une éolienne très performante qui alimente toute la base vie (radio HF, éclairage, télévision, ordinateurs, appareils personnels tels que résistances, portables, stéréos…). Le radar surveillant la façade maritime du parc fonctionne à l’aide de panneaux photovoltaïques. Le radar permet d’arraisonner de nombreuses pirogues et bateaux qui braconnent dans les eaux très riches du parc. Ceci constitue une rentrée d’argent non négligeable sous forme de lourdes amendes. 180 kilomètres de linéaire côtier dépendent de trois radars de surveillance. La conservation des ressources halieutiques est à ce prix.
Après une nuit froide passée sous tente, à l’abri d’une grande dune, il faut attendre la marée basse pour reprendre le voyage. Elle est annoncée pour 15 heures. À 11 heures, je tente un départ. Le sable dur occupe à peine trois mètres de plages. Le vent faible pousse dans la voile pour une vitesse inférieure à 15 km/h. À 13 heures, le vent se lève à la faveur de la renverse enclenchée par la marée qui débute son retrait. Des pointes de vitesse de 70 km/h sont enregistrées au Gps embarqué. Pour un engin d’une trentaine de kilos, ce n’est pas si mal !
La journée s’achève au port de pêche de Nouakchott, à deux jours du point de départ et à 237 km du point de départ. Des centaines de personnes vêtues de leur plus beaux boubous déambulent sur la plage à l’occasion de la fête religieuse.
Mercredi 11 mars, quelque part sur la côte mauritanienne.
Il est 20 heures, le soleil se couche et le vent faibli. Le temps est venu de s’arrêter pour la nuit d’autant que la mer ronge la plage.
Depuis 16 heures, ce sont 60 kilomètres de plage parcourus à une vitesse relativement faible.
La dernière heure, la moyenne était d’à peine trente kilomètres à l’heure. On s’habitue aux grandes vitesses !
Le véhicule suiveur tente une sortie de plage vers les dunes pour échapper aux vagues. Il se fige, le châssis reposant sur le sable mou. Il faut le dégager, pousser, enclencher le crabotin, placer quantité de branches sous les roues, construire une digue pour éviter que l’eau de mer ne le fige dans le sable. Plus d’une tonne de métal gît sur la plage à deux doigts d’être définitivement bloqué par les déferlantes. Le kart à voile, lui est bien au sec, à bonne distance de la plage. Il ne pèse qu’une trentaine de kilos… En terme de mobilité, je pense qu’on peut envisager un autre futur à ces chaudières mal réglées que sont les automobiles lourdes, polluantes, chères et peu pratiques au final.
Il est deux heures du matin, le véhicule d’accompagnement vient d’être dégagé après six heures d’angoisse, de pelletage et d’acharnement. Il rebrousse chemin en direction du pk 28 (28 kilomètres au sud de Nouakchott) et rejoindra la plage plus au sud. Le kart à voile, fringant, la voile frémissante au vent, est prêt à prendre la plage jusqu’à Saint-Louis puis Dakar.
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